Cis-tème

Il devient une femme pour échapper à l’injonction d’être « un homme, un vrai »

Depuis 2022, il est possible en Suisse de changer relativement facilement sexe à l’état civil. Un jeune homme qui n’aimait ni la moto, ni les stamms agrariens et encore moins harceler dans la rue en a profité pour échapper à l’injonction d’être « un homme, un vrai ». 

S’il y avait pensé plus tôt, Mike* aurait sans doute entrepris les démarches en 2022, à savoir au moment où la Suisse a décidé de faciliter la procédure de changement de sexe auprès de l’état civil. Depuis tout petit, Mike ne colle en effet pas aux standards de la masculinité. Jouer au ballon, il n’aime pas. Passer son après-midi dans une réunion remplie d’individus ventripotents affublés d’une chemise d’armailli, il déteste. Quant à conduire une grosse moto qui fait un boucan d’enfer – et, cela étant, avoir Sylvain Thévoz en sainte horreur –, cela n’est de loin pas sa tasse de thé. Ses loisirs comme lire des livres, écrire ou plus récemment se poser à la Pointe pour déguster des Spritz lui ont d’ailleurs toujours valu des qualificatifs comme ceux de « tapette » ou de « folle » de la part de ceux qu’il appelle ses « amis ». Ainsi, en apprenant hier qu’un individu avait changé administrativement de sexe afin d’éviter l’Armée, Mike a eu la brillante idée de faire de même pour échapper à la sempiternelle injonction d’« être un homme, un vrai. »

C’est cette idée en tête qu’il se rendait ce matin au guichet de l’état civil. En une demi-heure, le tour était joué. Une autre demi-heure lui suffit également pour prévenir ses « amis » de ce qu’il était désormais une femme et pour recueillir les félicitations d’usage. À midi, tous déjeunèrent ensemble pour fêter cela. C’est alors que Mike – qui avait gardé son prénom d’homme – décida de tester ces derniers en commandant un Sex on the Beach. À sa grande surprise, aucun ne fit la moindre remarque. Ce fut en effet comme si le simple fait qu’il soit, sur un bout de papier, devenu une femme empêchait désormais ses amis de constater que les Sex on the Beach « c’est pour les fiottes » et qu’un « homme, un vrai » eût préféré un verre de whisky ou une IPA. Beaucoup de ses anciens confrères lui demandèrent même s’ils pouvaient goûter son cocktail qui, ma foi, avait l’air délicieux et dût l’être si l’on en croit leurs yeux qui s’illuminèrent au moment où ils burent. Apparence oblige, l’un de ses « amis » recracha toutefois la gorgée qu’il venait d’absorber sur la table. « Pouahhh, c’est vraiment une boisson de bonne femme ! », s’exclama-t-il alors en rigolant sous le regard de Mike qui se dit qu’il y avait encore du boulot pour que les hommes comprennent qu’il n’y a aucun mal à ne pas s’en faire constamment. 

La Rédaction. 

*Nom d’emprunt. En vrai il s’appelle Robert mais ça ne change rien puisque vous ne le connaissez pas non plus. 

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