Chroniques

Chroniques d’un complotiste ordinaire – La Fin Damnée

Lundi, alors que je me réveille en slip et que j’apprends l’évasion de quelques quatre-cent Anglais du bagne de Verbier où ceux-ci ont été placés en garde-à-vue et obligés d’écouter un Ted Talk de Mike Horn faisant le récit de ses expéditions à la recherche du pangolin zéro, je me découvre également complotiste, c’est-à-dire que j’affectionne autant les groupes Facebook « Nous Sachons » et les réunions secrètes sur la place des Nations que j’aime me foutre des mines le soir du réveillon dans une fête bretonne où un cordon de sécurité laisse filtrer, à l’inverse des nightclubs, dira-t-on, des drogues et toutes sortes de produits illicites en veillant à refouler bien comme il faut les forces de l’ordre. Lundi donc, les perfides filent à leur manière alors que Mike Horn reprend son souffle. Direction Nice, les Anglais iront se recharger en vitamine D sur la promenade éponyme. 

Mardi, ma parole les Anglais font à nouveau la une du canard dont je me sers pour m’informer et m’essuyer les fesses ! Ces derniers y sont dépeints en héros de la Résistance face au diktat de la main invisible qui façonne nos quotidiens. À côté, la presse mainstream et les déclarations de la station de ski nous informent qu’ils ne se seraient pas enfuis, mais auraient été retrouvés dans une cave ivres morts, y gisant depuis deux jours. Enfin, on ne sait pas trop, parce que l’office du tourisme bagnard ne sait pas elle-même si elle doit comptabiliser les jamaïcains qui s’entrainent au bobsleigh dans la région. Ceux-ci sont-ils toujours des sujets de la couronne ? Bref, personne n’y pipe que dalle tandis que la task forcecovid redoute la troisième vague et le fait savoir à toute la population pour que celle-ci partage ses préoccupations. Habile. 

Mercredi, j’apprends la reconversion de Pierre Maudet dans le consulting pour restaurateurs indépendants. Ou bien c’est lui qui est désormais indépendant ? Je ne sais que trop. À mon humble avis, cependant, celui-ci aurait mieux fait d’ouvrir un salon de coiffure. Lui qui aime tant commérer avec les gens ! Quid du stand de kebab ou même du troquet clandestin dissimulé derrière une porte-battante du Sagitarrio actionnée par la poignée d’une tireuse à bière ? L’audace de l’ancien PLR me surprend et je décide donc de me faire passer pour un faux restaurateur qui souhaite recueillir quelques conseils avisés du monsieur-je-sais-tout local. Ni une ni deux, j’enfile mon tablier et ma plus belle perruque blonde dont je sais qu’elle le fera frémi à peu près autant que DSK à la vue d’un Sofitel new-yorkais. Cependant démasqué par les sbires du conseiller – Simon Brandt et Antoine Daher, postés en videurs à l’entrée de la petite échoppe – je rencontre rapidement un point d’achoppement en l’objet d’un trottoir en granit contre lequel s’ouvre mon arcade et quelques-uns de mes membres qui ne me sont pas d’une grande utilité, notamment mon cerveau – dois-je vous rappeler que je suis complotiste ? Me gratifiant de quelques coups de pieds supplémentaires, les deux gorilles s’en vont ensuite en me laissant leur carte de visite, sait-on jamais, si un jour ou l’autre je souhaite être défendu. Contusionné mais remerciant le sensei Jésus Christ de m’avoir laissé la vie sauve. Je me couche après une journée bien chargée.

Jeudi, c’est le Saint-Sylvestre. Je la renomme expressément la « Saint Sylvain Durif » en l’honneur de cette année claquée au sol. Rien de particulier non plus sous le soleil de Chloé Frammery dont j’attends depuis quelques jours qu’elle nous explique sa vision du nouvel an. Probablement une fête orchestrée par le grand Judas mondial, celui qui tire les ficelles du monde et qui nous impose le port insupportable du masque pour sauver des vies. À d’autres ! je lui préfère la gin tonic que je boirais ce soir en Bretagne.

Vendredi, grosse rave party qui continue non pas sous le soleil des tropiques mais sous la lugubre lueur du ciel lieuronnais dissimulé par les nuages. Sous acide, j’observe les éléphants rose ainsi qu’Emmanuel Macron en train de danser la zumba tandis que des corps ramenés à la vie par notre tapage nocturne surgissent de la terre. Ce sont les damnés de la Terre, n’en déplaise à Franz Fanon, qui viennent me souhaiter la bonne année, heureux, eux-aussi, de revoir la vie dans une région habitée par trois pékins et deux vaches à cornes. Je prends peur lorsqu’ils m’invitent à les rejoindre et je m’enfuis. 

Ainsi va la vie d’un complotiste ordinaire qui, à ce rythme-là ne finira point bicentenaire. 

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