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Coincé sous une barre de développé couché durant le confinement, il témoigne (2).

Dans l’épisode précédent, Jean-Frédéric était en train de transpirer toutes les larmes de son corps pour relever la barre de DVC – développé couché – qu’il avait chargé généreusement dans l’optique de se forger de gros pectoraux bien saillants. Or, sur l’avant dernière répétition, il avait commencé à faiblir. Reprenons à cet instant, où la vie de Jean-Frédéric était en train de basculer de même que la barre qu’il tenait fermement entre ses deux poings fermés et contractés le plus qu’il pût :

Jean-Frédéric est en hésitation. Soit il essaie de pousser plus fort, au risque de se déchirer un muscle, soit il maintient la barre, situé à peu près au milieu de sa capacité d’extension, en espérant que l’équipe d’entretien le retrouve sitôt l’établissement clos. Confiant comme Emmanuel Macron à l’approche des élections, il opte pour la première option. C’est là son erreur, car déjà exténué par ses exercices précédents, sont corps et se pecs’ d’homme fragile aux sentiments doux ne parviennent pas à soutenir le poids écrasant de la barre. Plus encore, il sent que ses bras l’abandonnent – comme sa dernière petite amie pour un grand musclé au physique de gros bolide allemand. Ne souhaitant pas revivre une telle déception, il tente alors un dernier geste désespéré, celui de faire basculer la barre sur le côté, afin de s’en extirper tant bien que mal une fois la moitié de la masse disposée sur le sol. C’est oublier qu’il ne pourra plus pousser la charge que d’un bras…

Ainsi, Jean-Frédéric, qui n’est pas un intellectuel, encore moins un spécialiste des questions de gravité, s’exécute. Il se retrouve alors bloqué définitivement sous la barre, qu’il ne pourra plus redresser durant deux mois. En effet, les nettoyeurs, qui comme chacun le sait, rechignent plus souvent à la besogne qu’à écluser quelques Super Bock en fin de journée, ont abusé de la confiance de leur employeur et n’ont nettoyé que les vestiaires. Les bougres ! 

Au bout de deux longues heures – qui ne seront en réalité qu’une infime portion de l’attente de Jean-Frédéric – notre protagoniste abandonne donc l’idée d’être secouru. Il fait sien l’adage de Bear Grylls – « improvise, survit, surpasse » – et commence alors à imaginer ses options. Juste à côté de lui sont en effet disposés sa gourde remplie de protéines, qui devaient servir à alimenter sa fibre déchirée, un quart de banane et une barre de céréales protéinées goût caramel beurre salé. Avec tout cela, se dit-il à lui même, puisqu’il n’est plus qu’en sa propre compagnie, il pourra bien survivre une semaine ou deux. Et puis, de toute façon, quelques personnes s’inquiéteront bien de son absence, se dit-il. Et non ! En effet, souvenez-vous, la copine de Jean-Frédéric venait de se faire la malle avec un grand musclé au physique de gros bolide allemand! Quant à ses amis, vous demandez-vous ? Il serait faux de dire qu’il n’en a pas. Mais ses amis sont assez spéciaux et ne lui adressent la parole que lorsqu’ils ont besoin de lui. Or, puisque, rappelez-vous, Jean-Frédéric n’est pas capable de grand chose d’intellectuel ni de physique – l’histoire présente en témoigne – ses amis ne lui adresseront pas un seul message durant tout le confinement qu’il passera sous sa barre et ne s’inquiéteront pas de sa situation. 

Lorsque Jean-Frédéric se rend compte de cet état de fait – c’est-à-dire au bout d’une semaine, alors qu’il vient de terminer ses réserves de bananes et de barre protéinée – il n’est même pas surpris et s’insurge simplement contre lui-même pour s’être surestimé. Il mangera quatre de ses orteils pour survivre un temps supplémentaire avant d’entamer un jeûne jusqu’à la réouverture du fitness. Par chance, il se trouve non loin d’un écran qui diffuse en boucle la retransmission de la remontada du barça face au Paris Saint-Germain et le quart de finale de la coupe du Monde 2018 France-Argentine. À notre arrivée sur les lieux pour interroger ce « rescapé » aussi chanceux que Tom Hanks dans Seul au monde, celui-ci déclamera : « SECOND POTEAU PAVAAAAAAAARD » avant de perdre l’équilibre en essayant d’exécuter la même volée en appui sur les muscles atrophiés du seul orteil restant de son pied gauche. 

La rédaction.  

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