Genève

Antifascisme – Il boute le feu à une épicerie « collaborative »

Comme beaucoup d’autres avant lui, Jean-Amédée a cru que les réunions qui s’y tenaient le jeudi soir avaient trait aux idéaux fascistes…

Il est vingt et une heure ce jeudi, heure de Genève, lorsque Jean-Amédée allume un cocktail Molotov de fabrication soviétique et le balance à travers la vitre d’une toute nouvelle épicerie collaborative située dans le quartier de la Jonction. Rapidement, il voit les flammes croitre et des ombres bouger au travers des rideaux rouges – des rideaux aux couleurs du régime hitlérien, se dit-il. L’aréopage de nazis ici réuni tente vainement d’apaiser la colère du brasier, mais lorsque les gens qui le composent comprennent qu’il leur sera impossible de calmer les flammes, ceux-ci s’enfuient dans tous les sens. D’aucuns sauteront par la fenêtre, tandis que les autres emprunteront simplement les escaliers. Toujours est-il que Jean-Amédée a l’impression d’avoir réussi son coup. En admirant le spectacle, il se fend d’un sourire…

Son impression est cependant de courte durée. Bientôt, l’un des collabo’ qui se trouvait auparavant dans l’épicerie collaborative à laquelle Jean-Amédée a bouté le feu se dirige droit vers ce dernier… Jean-Amédée est alors pris de panique. Bien qu’il les connaisse de réputation, il ne s’attendait pas à ce que ces nazis soient vraiment violents. Son cerveau lui intime alors l’ordre de s’enfuir, mais ses jambes s’emmêlent ; il trébuche et s’affaisse sur  l’angle du trottoir adjacent. Son poursuivant accélère le pas ; il redouble d’effort pour arriver à la hauteur de Jean-Amédée. Le suspens est à son comble tant et si bien que J-A est pris de petits tremblements réguliers. Il trépide non pas d’impatience mais de peur. Peur de se voir passer à tabac. Pire. Peur de mourir sous les coups de la barbarie. 

Nonobstant la menace qu’il voit peser sur lui, il décide de rester digne et de trépasser fièrement. Il redresse alors le torse. Son menton qui vient d’heurter le trottoir saigne et le liquide qui ruisselle tranquillement jusqu’à se décrocher de la base de sa galoche le dérange quelque peu. Courageux, il fait fit et se dresse encore plus fermement à l’endroit de son agresseur.

Contre toute attente, son agresseur ne le rue pas de coups. D’ailleurs, il s’agit vraisemblablement d’une « agresseuse », qu’il reconnaît au doux son de sa voix, laquelle n’est pas marquée par les traits caractéristiques d’une colère. Non, bien au contraire. Arrivée à sa hauteur, elle se jette presque instantanément sur le sol, à côté de lui. Elle sort alors un Kleenex usagé dont il n’est pas bon de faire usage sur autrui en ces temps de coronavirus et essuie le visage de Jean-Amédée. Pour lui qui n’a jamais connu que la tendresse des coups de matraque de son père contre son dos, ce témoignage d’affection est pour le moins étrange. 

La dame le questionne alors: que fait-il ici ? A-t-il vu celui ou celle qui a lancé un engin explosif contre la vitre de leur toute nouvelle épicerie ? Jean-Amédée, stupéfait à en être stupide, ne parvient pour toute réponse qu’à indiquer une direction avec son doigt. La dame ajoute alors abattue : « là-bas, ce sont les fascistes… Ils nous avaient menacé. Mais je ne pensais pas qu’ils passeraient à l’acte… Le monde est rempli de personnes malhonnêtes, mais toi, j’ai le sentiment que tu es quelqu’un de bien. Comment t’appelles-tu au fait ? ». Au terme du soliloque de cette inconnue, Jean-Amédée a pu reprendre ses esprits et il répond simplement: « Jean-Amédée ».  Elle ajoute : « viens avec nous, nous t’apprendrons à confectionner des bougies menthe-curcuma, à modeler des sextoys en grès et à partager le peu de nourriture que nous donne la terre ». Jean-Amédée de conclure: « Moi qui pensais que vous discutiez de la meilleure façon de dénoncer les défenseurs de la liberté ! Mince alors ! ».

La Rédaction. 

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