Poussé dans ses derniers retranchements par une horde de manifestants « ingrats » et « qui ignorent les réalités auxquelles je suis confronté tous les jours ! », Paul Biya, le président du Cameroun a promis qu’il passerait moitié moins de temps à l’hôtel Intercontinental de Genève. Il n’a toutefois pas précisé ce qu’il allait faire de son temps libre.
Malgré l’interdiction de manifester, une petite centaine de Camerounais mécontents du travail assidu de leur président se sont réunis aux abords de l’hôtel Intercontinental, au Petit-Saconnex. Leurs revendications : que leur dirigeant cesse de dilapider les avoirs du pays dans des frais de représentation et des séjours luxueux à Genève où les qu’en dira-t-on affirment qu’il apprécie tout particulièrement le Relais de l’Entrecôte ; que sa compagne arrête de louvoyer comme un fleuve agité entre les boutiques Gucci et LVMH de la rue du Rhône ; enfin, qu’il travaille à améliorer non pas son swing sur le terrain de golf de Cologny, mais les relations diplomatiques son pays avec ses voisins, puisqu’après tout, il se trouve au sein de la Genève Internationale si chère à notre ami Christian Lüscher.
La police genevoise était également au rendez-vous, préparée à l’éventualité d’un débordement car « on ne sait jamais avec ces sauvages », déclarait ce matin un agent de la brigade anti-criminalité sous couvert d’anonymat et d’une cagoule qui lui donnait, précision somme toute importante, un petit air de Kalash Criminel. Dans un premier temps assez attentiste, les forces de l’ordre ont par la suite dispersé la foule qui « commençait à crier dans une langue bizarre et qui paraissait assez violente ». Le même agent de témoigner : « On a vu que la tension montait, que ça commençait à faire des gestes et puis l’un de ces sauvages nous a lancé un œuf, alors là on a dû réagir proportionnellement. On a lancé des grenades lacrymo et taquiné quelques émeutiers avec nos matraques. Rien de bien méchant, mais il fallait maintenir l’ordre. ».
Du rebord de sa piscine à débordement, Paul Biya, 88 ans, dont 38 ans 8 mois et 12 jours à la tête de la démocratie camerounaise, a alors pris conscience. Après avoir éclusé rapidement la fin de son mojito, il s’est levé, séché, habillé, coiffé, a mis du parfum et s’est rendu dans le hall de l’Intercontinental où il a pu tenir une conférence de presse d’environ 30 secondes. De déclarer : « Mes frères, bien que mon train de vie puisse paraître trop fastueux, il n’en est rien. Car si je goûte les plaisirs de la vie, c’est pour vous mes frères* ! Car j’acquière de l’expérience dont vous pourrez également profiter en achetant mon nouveau livre intitulé Menus Délices de la Vie Occidentale ! Ceci étant, je vous demande de faire preuve de compréhension et de bien vouloir déguerpir. Je dois passer chez Cartier où une montre 18 carats m’attend impatiemment et vous bouchez la sortie de mon Aventador ! Je vous promets également de passer un peu plus de temps au pays et de demander à mes délégués de vous lancer quelques miches de pain supplémentaires toutes les semaines, c’est bien ça que vous vouliez non ? ».
Sur ces belles paroles, notre stagiaire fondait en larmes en balbutiant les mots suivants : « Quand on n’a rien, on a le cœur sur la main… ».
La Rédaction.
*On notera tout de même que le président du Cameroun n’est pas très inclusif en oubliant ses « sœurs ».
Illustration : « President of Cameroon Addresses General Assembly » by United Nations Photo is licensed under CC BY-NC-ND 2.0
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