Monde

La Suisse ne vend pas d’armes de guerre, mais des moyens potentiels de s’autodétruire de manière librement consentie

Les multinationales qui exportent du matériel de guerre ne seraient ainsi pas responsables des usages qu’en font les peuples en conflit.

À l’approche des votations du 29 novembre 2020 et de la seconde vague de covid qui n’a de réjouissant, peut-être, que le sentiment qu’on pourrait la surfer, notre Rédaction vous propose une série de reportages totalement tirés par les orteils méphitiques de vos élus locaux en faveur de l’exportation d’armes. Les mêmes qui sont souvent en défaveur de l’initiative « multinationales responsables », car les gentilles multinationales vous veulent du bien, en témoigne la magnanimité de Nestlé laquelle ne fait, après tout, que s’approprier des terrains gorgés d’eau pour revendre cette dernière aux populations qui en manquent – quelle générosité !

Nous nous sommes donc rendus où tout a commencé, dans une petite usine Ruag à Schwytz, juste avant que la pandémie n’annihile la moitié de la population du canton. Le patron nous a accueilli en déroulant le tapis rouge – parce qu’on lui avait fait croire qu’on venait d’Arabie Saoudite et qu’on souhaitait « voir le produit » à la conception. 

« Mes amis les Arabes ! », a-t-il débuté, ne manquant pas, au passage, de nous saluer d’une légère inclinaison du torse, comme on le fait au Japon. « Vous allez voir aujourd’hui, mes rhos, une usine à la pointe de l’industrie helvétique ! », a-t-il ajouté. « Mais d’abord, enlevez vos babouches, s’il vous plaît, je ne tiens pas à ce que du sable vienne se glisser dans le procédé de fabrication de nos barillets ». Je retire alors mes Louboutin, lui faisant remarquer, soit dit en passant, que ce ne sont pas de vulgaires babouches dégottées dans le souk marrakéchois du coin. Toujours est-il que la visite a débuté et que je suis autant à la bourre que bourré des shots que je me suis enfilé la veille. Mon odeur, de même que ma démarche, me trahissent, mais je garde le cap comme un esquif guidé par le sémaphore de mon objectif : démontrer, en m’infiltrant comme mes grands-frères spirituels de Heidi.news, que les armes serviront à tuer des êtres humains. Que tuer, c’est mal. Et que j’ai ce genre de réflexion parce que je compte m’inscrire au concours miss univers 2021, après que toutes mes concurrentes internationales aient été happées par le covid-19 – en même temps faire 1m80 et 45kg, ça n’aide pas à développer un système immunitaire digne de ce nom. 

Bref, à un moment de la visite, alors que Ueli – c’est le prénom de celui qui nous fait la visite – nous révèle discrètement que lui aussi fait travailler des ouvriers pakistanais, sri lankais et indiens dans les sous-sols de son usine, celui-ci déclame : « Au final, nous ne faisons que produire des moyens potentiels de s’autodétruire de manière librement consentie ! Ce que vous les Arabes vous faites avec nos grenades et nos fusils, ce n’est pas notre problème. Enfin si… Si nous arrêtons de produire, vous deviendrez notre problème puisque vous allez embarquer dans des coques de noix pour traverser la Méditerranée et venir vous installer à la maison. En vous vendant des armes, je rends donc à la fois service à mon pays et à vous-même ; nous gardons nos frontières et vous gardez votre pouvoir. C’est un business gagnant-gagnant ! ». 

Sans oublier que pour être entrepreneur, il faut une part de naïveté…

La Rédaction. 

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