Genève

Des propriétaires renoncent à affirmer qu’ils se sont « construits tout seul » après que l’Etat a accepté une subvention de 500 millions pour rénover leurs passoires énergétiques

Pris soudainement d’honnêteté après que le Département du territoire a accepté le principe d’une subvention de 500 millions de francs – auparavant 200 millions, ce qui faisait déjà près de quatre fois les 63 millions destinés à indexer les salaires de ses employés en 2024 –, quelques grands propriétaires fonciers ont reconnu qu’ils ne s’étaient jamais « construits tout seul » et qu’ils auraient encore moins « pu conserver leur position dominante ainsi que leurs privilèges » sans le concours de l’Etat. Ils lui disent à cet égard « merci », mais continueront cependant à augmenter les loyers aussi longtemps qu’ils le pourront.

« Merci, c’est vraiment sympa ! », peut-on lire sur la lettre envoyée par un petit groupe de grands propriétaires foncier*, à ses partenaires sociaux dont fait partie le grand et tout impuissant Etat de Genève. Qu’est-ce qui a bien pu motiver la politesse de ces individus régulièrement critiques et ingrats vis-à-vis de celui qui, pourtant, garantit leur prospérité sans jamais rien demander en retour qu’un sourire et une bonne tape dans le dos ­? En trois mots : cinq cents millions. Cinq cents patates, oui. Somme destinée à les inciter – car pour eux rien n’est jamais obligatoire, pas même les impôts – à rénover, s’ils le veulent bien, enfin peut-être, les passoires thermiques qu’ils possèdent et dans lesquelles vivent plusieurs dizaines de milliers de Genevois, lesquels sont pourtant, eux, bien obligés de régler leurs loyers – qui du reste continueront bel et bien d’augmenter – rubis sur l’ongle.

Or, non contents de faire montre d’une rare sympathie vis-à-vis de celui qui devrait donc leur offrir près de neuf fois ce qu’il offrira de rallonge, en 2024, à celles et ceux qui bossent pour lui, quelques grands propriétaires fonciers ont également admis qu’ils ne s’en seraient jamais sortis sans l’aide de l’Etat. Mieux encore, qu’ils ne se sont pas « construits tout seul », comme aiment à le répéter les individus de leur classe sociale, mais avec son concours et sa bénédiction ; lui qui leur offre notamment le cadre dans lequel exercer sans contraintes leur activités économiques et les arrose tantôt d’un crédit d’impôt, tantôt d’une subvention afin de les inciter péniblement à faire ce qu’il pourrait pourtant faire lui-même, n’était sa tendance à se déposséder de ses moyens d’action. « Il faut bien l’avouer, sans l’Etat nous ne serions rien », déclarait ainsi, honnête, l’un de ces grands bourgeois. « Quand il faut nous maintenir à flot durant les pandémies, l’Etat est là. Quand il faut protéger nos biens ou nos personnes, il répond également toujours présent », redoublait alors un deuxième. « Cela me fend le cœur de le dire, mais sans lui nous ne serions pas là où nous sommes, à tout le moins n’y resterions-nous pas », avouait pour sa part un dernier à la fin du cocktail organisé en l’honneur de l’Etat – et financé, par ailleurs, par ses propres sous.

La Rédaction.

*Donc pas vos darons qui remboursent tous les mois leur hypothèque.

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