L’Université de Southampton vient tout juste d’inaugurer un laboratoire qui accueille et soumet des sans-abris à des conditions climatiques extrêmes. L’idée est de déterminer le seuil à partir duquel il devient impératif de ne plus les laisser crever dans la rue la gueule ouverte.
Le thermomètre affiche -24oC dans l’enceinte où sont confinés deux SDF ramassés sur le bas-côté de la route dans la banlieue nord de Londres. Habillés comme ils le sont d’ordinaire en plein hiver, mais dotés de papier journal à discrétion, Joe et Jack, claquent des dents tandis que Michel, un scientifique anglais de l’Université de Southampton, chronomètre le temps qu’il leur faut pour entrer en hypothermie. Trois minutes plus tard, Michel exulte : ces deux-ci ont tenu le double des deux précédents qui n’avaient pas accès à du papier journal en quantité illimitée. Il note ainsi dans son carnet de bord : papier journal = double de temps. Michel fait ensuite entrer deux autres cobayes, nus cette fois-ci. Sur son tableau de bord, il presse également sur le bouton blizzard. Une nouvelle expérimentation peut commencer.
Depuis lundi, des centaines de SDF se succèdent ainsi dans ce nouveau laboratoire aménagé dans le sud de Southampton. Là-bas, dans un hangar grand comme deux fois l’ego du politicien libéral-radical moyen, est installée une immense machine qui permet aux scientifiques de reproduire dans plusieurs salles les conditions les plus extrêmes de la planète comme celles de l’Antarctique, du sommet de l’Himalaya, du désert du Sahara ou du Zoo à six heures du matin lorsque le sol, transformé en marais, est devenu aussi hostile qu’un supporteur sédunois un jour de derby contre le grand Servette FC. Ce nouveau laboratoire n’est cependant pas un centre d’hébergement d’urgence, bien au contraire. Car justement vise-t-il à déterminer les conditions optimales de survie des SDF dans la nature, ceci afin de décharger l’État et ses représentants de toute responsabilité en cas de décès de l’un d’eux.
« Si, par exemple, on parvient à démontrer qu’en moyenne les SDF ne décèdent pas lorsque le mercure ne descend pas en-dessous de zéro, alors le gouvernement n’aura pas besoin de mettre en place une véritable politique de lutte contre le sans-abrisme. C’est formidable, non ?! », s’exclame ainsi le chercheur mandaté par son premier ministre, Rishi Sunak, en personne. « Nous n’en sommes pour l’instant qu’aux premières expérimentations »,précise ce dernier, « mais nous avons déjà réussi à démontrer que la présence de plusieurs SDF dans un même endroit augmentait considérablement la durée de vie de tous les membres du groupe ! C’est magnifique non !? », conclut-il. En effet, pour ce qui est de la Suisse en tout cas, cela devrait permettre aux conseillers nationaux qui s’opposent à toute modification profonde du droit du bail et plus généralement à tous les politiciens de droite d’avoir la conscience – encore – plus tranquille lorsqu’ils s’endormiront le soir en laissant crever des centaines de personnes dehors, en plein froid.
La Rédaction.